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Les chroniques de la Rue des livres

Les présentations de romans, albums pour petits et grands, diffusées sur Radio d'Oc Moissac

Une terre bénie de Dieu / Ali MALEK.- Ed. Non Lieu (Collection à la Marge), 2006

Publié le 11 Janvier 2016 in Romans, Kabylie, Algérie, Guerre

Une terre bénie de Dieu / Ali MALEK.- Ed. Non Lieu (Collection à la Marge), 2006

Nous sommes en Algérie, dans les premières années de la guerre civile. Plus précisément à Anezrou, un petit village perdu de Kabylie. Fatima, la directrice de l’école du village, a pour amant un seigneur de guerre, El Hadj. Sofiane, un cousin réquisitionné par l’armée, lui fait un enfant lors d’une permission, mais meurt à Béchar. Fatima avorte puis accepte d’épouser un retraité de l’armée qu’El Hadj lui a déniché. Il y a aussi Hocine, fonctionnaire de mairie qui quitte tout pour devenir berger. Tous vont éprouver la guerre civile qui sévit, chacun à leur manière. D’abord de loin puis au plus profond de leur être.

Fatima par exemple, se retrouve sans aucun enfant à éduquer du jour au lendemain. La rumeur, et seulement elle, a fait vider l’école du village. Désormais vide, elle devient le lieu de rendez-vous des terroristes. Prise en otage l’institutrice n’aura d’autre choix une fois libérée que de les nourrir pour rester en vie. Mais Anezrou est un petit village dans lequel tout finit par se savoir… et Fatima se retrouve jugée pour complicité, éprouve la prison de laquelle elle reviendra émaciée et pleine d’opprobre.

Ali Malek n’est pas tendre avec ses personnages et rend compte du climat d’inquiétude et de peur qui grandit de jour en jour dans la population. Il épingle les comportements et les incohérences de chacun car la religion et les traditions faussent les cartes bien trop souvent.

Il y a quelque chose d’émouvant en fin de journée dans le spectacle des gens qui rentrent chez eux, imprégnés de la hâte d’apporter aux leurs la bonne nouvelle de revenir sain et sauf. Emouvant spectacle d’une population qui, n’ayant pas voté pour les religieux, s’est cru en droit d’être épargnée. Une population ébahie alors que, depuis Jugurtha, l’Algérie regorge de guerres civiles… L’ennui n’existe plus ; vivre a gagné en préciosité quand à l’entour le meurtre terrasse à chaque instant. Partout où l’on se rencontre, ce n’est qu’échanges de bilans d’attentats, sans autre commentaire que les chiffres. Les déplacements hors de la commune sont évités au maximum, de sorte que l’attaque de la poste ou d’un dispensaire dans une commune limitrophe met une semaine ou deux pour parvenir, comme avant l’invention des médias. Chaque jour, neuf à dix Toyota de la gendarmerie sillonnent la route des Aït-Anezrou, à faible allure, les armes hors des vitres, le regard des enfants braqués sur elles.

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