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Les chroniques de la Rue des livres

Les présentations de romans, albums pour petits et grands, diffusées sur Radio d'Oc Moissac

Macadam / Jean-Paul Didierlaurent.- Au Diable Vauvert, 2015

Publié le 25 Janvier 2016 dans Nouvelles

Macadam / Jean-Paul Didierlaurent.- Au Diable Vauvert, 2015

Vous souvenez-vous du Liseur du 6h27 (émission 32) de Guylain Vignolles et de la Zerstor 500, cette Chose qui déchiquetait les livres ? Ce premier roman du nouvelliste Jean-Paul Didierlaurent ?

Revenons-donc à son activité de nouvelliste avec le recueil Macadam. 11 histoires tour à tour drôles, poétiques ou carrément noires. Un concentré regroupant les meilleurs textes de l’auteur écrits entre 1997 et 2012.

L’avantage avec les nouvelles, c’est qu’on peut les picorer, passer de l’une à l’autre et changer d’univers. Chacune d’elle nous propose un individu quelque peu ordinaire (un curé, une dame-pipi, une jeune femme au guichet autoroutier, un enfant, un toréador…) mais joue sur les failles et les lignes de rupture qui peuvent apparaître dans leurs vies. Rien de dramatique la plupart du temps, car l’auteur joue facilement avec chacun des registres émotionnels en dépeignant en seulement quelques pages l’intimité de chacun d’eux.

Le recueil s’ouvre par exemple sur In nomine Tetris dans lequel le prêtre Duchaussoy qui s’ennuie (la routine peut-être terrible…), joue à la Game Boy pendant les confessions. « Si les voies du Seigneur étaient impénétrables, celles du Tétris ne l’étaient plus pour lui. »

Truculent même si aujourd’hui il jouerait plus facilement à Candy Crush !

Mosquito aborde quand elle le destin tragique de celui qu’on appelle L’Ange de Séville, un toréador encorné dans l’arène… la faute probablement au trompettiste qui rata une note, ou plutôt non… la faute d’une mouche…

Deux nouvelles, à mon avis, sortent du lot… sans doute est-ce dû à mon goût prononcé du dramatique et du tragique… Tout d’abord Shrapnel qui évoque le traumatisme d’un homme confronté au combat et qui revient sur les lieux dans ses dernières heures. Jean-Paul Didierlaurent nous offre là une histoire d’une intensité particulière avec cette économie de mots que l’on attend toujours de la part de la nouvelle. Et puis, il y a Rose Sparadra, qui fait entendre la voix criante d’une enfant qui fait basculer une réalité trop éprouvante derrière le voile de l’imaginaire, un voile qui sera levé dans la derrière phrase du texte. Plus la chute arrive brutalement, plus on se retrouve saisi à la lecture…

Une autre encore traitera avec tendresse du handicap moteur de Mathilde qui travaille à un guichet autoroutier (Macadam) ; une autre encore de la folie d’un homme (Le Vieux) ; ou d’un fossoyeur qui enterre les aiguilles de chacun des deux clochers des villages, l’un catholique, l’autre protestant, pour mettre fin à la discorde.

Macadam de l’humour noir, parfois grinçant, de la délicatesse et de la tendresse envers chaque personnage pour des univers très variés qui vont droit au cœur.

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Une terre bénie de Dieu / Ali MALEK.- Ed. Non Lieu (Collection à la Marge), 2006

Publié le 11 Janvier 2016 dans Romans, Kabylie, Algérie, Guerre

Une terre bénie de Dieu / Ali MALEK.- Ed. Non Lieu (Collection à la Marge), 2006

Nous sommes en Algérie, dans les premières années de la guerre civile. Plus précisément à Anezrou, un petit village perdu de Kabylie. Fatima, la directrice de l’école du village, a pour amant un seigneur de guerre, El Hadj. Sofiane, un cousin réquisitionné par l’armée, lui fait un enfant lors d’une permission, mais meurt à Béchar. Fatima avorte puis accepte d’épouser un retraité de l’armée qu’El Hadj lui a déniché. Il y a aussi Hocine, fonctionnaire de mairie qui quitte tout pour devenir berger. Tous vont éprouver la guerre civile qui sévit, chacun à leur manière. D’abord de loin puis au plus profond de leur être.

Fatima par exemple, se retrouve sans aucun enfant à éduquer du jour au lendemain. La rumeur, et seulement elle, a fait vider l’école du village. Désormais vide, elle devient le lieu de rendez-vous des terroristes. Prise en otage l’institutrice n’aura d’autre choix une fois libérée que de les nourrir pour rester en vie. Mais Anezrou est un petit village dans lequel tout finit par se savoir… et Fatima se retrouve jugée pour complicité, éprouve la prison de laquelle elle reviendra émaciée et pleine d’opprobre.

Ali Malek n’est pas tendre avec ses personnages et rend compte du climat d’inquiétude et de peur qui grandit de jour en jour dans la population. Il épingle les comportements et les incohérences de chacun car la religion et les traditions faussent les cartes bien trop souvent.

Il y a quelque chose d’émouvant en fin de journée dans le spectacle des gens qui rentrent chez eux, imprégnés de la hâte d’apporter aux leurs la bonne nouvelle de revenir sain et sauf. Emouvant spectacle d’une population qui, n’ayant pas voté pour les religieux, s’est cru en droit d’être épargnée. Une population ébahie alors que, depuis Jugurtha, l’Algérie regorge de guerres civiles… L’ennui n’existe plus ; vivre a gagné en préciosité quand à l’entour le meurtre terrasse à chaque instant. Partout où l’on se rencontre, ce n’est qu’échanges de bilans d’attentats, sans autre commentaire que les chiffres. Les déplacements hors de la commune sont évités au maximum, de sorte que l’attaque de la poste ou d’un dispensaire dans une commune limitrophe met une semaine ou deux pour parvenir, comme avant l’invention des médias. Chaque jour, neuf à dix Toyota de la gendarmerie sillonnent la route des Aït-Anezrou, à faible allure, les armes hors des vitres, le regard des enfants braqués sur elles.

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A la Croisée des Mondes : Les Royaumes du Nord T.1 et T.2 / Clément Oubrerie et Stéphane Melchior, d'après l'oeuvre de Phillip Pullman .- Gallimard, 2014 et 2015

Publié le 4 Janvier 2016 dans BD, Science-Fiction

A la Croisée des Mondes : Les Royaumes du Nord T.1 et T.2 / Clément Oubrerie et Stéphane Melchior, d'après l'oeuvre de Phillip Pullman .- Gallimard, 2014 et 2015
A la Croisée des Mondes : Les Royaumes du Nord T.1 et T.2 / Clément Oubrerie et Stéphane Melchior, d'après l'oeuvre de Phillip Pullman .- Gallimard, 2014 et 2015

Alors là… GROS GROS coup de coeur pour cette adaptation magique de l’œuvre majeure de Philip Pullman : A la Croisée des Mondes.

Ceux qui ont grandi dans les années 90 se souviendront de la trilogie où Will et Lyra partent à l’aventure pour tenter de sauver leurs deux mondes. Pour ceux qui n’auraient pas eu le bon goût de naitre avant 1999, vous vous souviendrez peut être du flop de la version cinématographique avec Nicole Kidman et Daniel Craig…. Pullman avait alors juré qu’on ne l’y reprendrait plus et que personne n’adapterait jamais son œuvre par la suite, sous peine de poursuites judiciaires….

MAIS, c’est sans compter sur le fantastique illustrateur Clément Oubrerie (qu’on connait déjà avec Aya de Yopougon, et une très belle transposition de Gatsby Le Magnifique) et son comparse, Stéphane Melchior au scénario. Les deux montent un projet et envoient les premières épreuves à Philip Pullman en lui demandant s’il serait d’accord pour qu’une nouvelle adaptation voie le jour… Le premier album de la série sort en toute discrétion à la fin du mois d’août 2014 et le deuxième volume à peine un an plus tard, en juin 2016.

Ces deux premiers volumes reprennent donc l’intrigue du premier tome de la série de romans : Les Royaumes du Nord

L’action se passe à Oxford dans un univers parallèle, où les gens sont accompagnés d’un daemon (prononcez démon), qui n’est autre qu’une partie d’eux-mêmes qui prend la forme d’un animal représentant leur personnalité. Je m’explique : vous êtes gardien de prison ? votre daemon sera sûrement un gros chien de garde, vous êtes souvent tentés de faire une petite sieste de trois heures ? votre daemon sera peut-être un paresseux, et si vous êtes une fouine dans la vie ? Bah… votre compagnon sera sans doute une fouine. Tant que vous n’avez pas atteint « l’âge adulte », votre daemon peut changer de forme en fonction des émotions que vous ressentez.

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