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Les chroniques de la Rue des livres

Les présentations de romans, albums pour petits et grands, diffusées sur Radio d'Oc Moissac

Morwenna / Jo Walton .- Denoël (Lunes d’encre), 2014

Publié le 30 Décembre 2014 in Science-Fiction, Handicap, Lecture

  • Prix Hugo - meilleur roman – 2012 (décerné par le public)
  • Prix Nebula - Meilleur roman –2011 (jury de professionnels)
  • British Fantasy Award.

Un livre-hommage à la littérature de science-fiction et aux littératures de l’imaginaire.

Morwenna / Jo Walton .- Denoël (Lunes d’encre), 2014

Morwenna Phelps est une jeune fille de 15 ans qui a déjà dû vivre quelques dures épreuves dans sa jeune vie : victime d’un accident terrible qui l’a laissée handicapée, elle perd aussi à cette occasion, sa sœur jumelle, Morganna. Cet accident est lié à un combat que les sœurs avaient mené contre leur propre mère, un être fou, une sorcière, leur ennemie mortelle. Depuis, Morwenna s’est réfugiée chez son père qu’elle n’avait jamais eu l’occasion de connaître et où elle découvre également peu à peu sa famille paternelle (3 vieilles tantes un peu sorcières et Sam, son grand-père). Elle est placée très rapidement à l'école privée d'Arlinghust, en Angleterre, dans laquelle elle peine à trouver ses repères et à tisser des liens. Arlinghust est en effet une école pour les familles aisées, aux codes particuliers, surtout entre élèves où rien ne compte plus que de savoir quel est le modèle de la voiture des pères. Le culte de la richesse, les relations sociales différentes, l’éloignement de sa terre d’origine qu’est le Pays de Galles, la solitude, la perte de sa sœur et son handicap rendent difficile l’adaptation à ce nouvel environnement.

Morwanna, ou Mori, comme on l’appelle, a cependant un univers intérieur bien riche : depuis sa plus tendre enfance, elle accède au monde des fées, ces fées du folklore gallois avec lesquelles elle jouait et qu’aujourd’hui elle continue de voir. Mais Morwanna se refuse à utiliser la magie. D’une part car elle risque de signaler sa présence à sa mère dont elle se cache, mais également parce qu’ elle risque de provoquer des évènements dont il est toujours impossible de mesurer les conséquences.

Mori a aussi cette capacité à se nourrir de lectures auxquelles elle consacre la majorité de son temps libre car elle ne peut participer aux très nombreuses activités sportives de son école. Lire, est pour elle un des moyens d’accéder au monde, et d’alimenter sa force de vie. Les livres lui servent autant de refuge que de stimulant intellectuel et deviennent une arme et une protection lui donnant le courage de combattre l’énergie maléfique de sa mère mais aussi de s’ouvrir aux autres. Cette activité au départ solitaire devient très vite un moteur de rencontre : elle se lie d’amitié avec la bibliothécaire de l’école, s’inscrit à la bibliothèque de la ville, participe à un club de lecture spécial SF, emprunte des livres à son père et vit sa première histoire d’amour. Les livres ont du pouvoir !

Le récit construit comme un journal intime n’est finalement pas un livre fantastique ou de science-fiction. Il entremêle si bien le merveilleux et le réel que l’on oublie à la lecture les possibilités magiques qu’il contient, jusqu’à se dire que la croyance en la magie n’est rien d’autre pour cette adolescente qu’un moyen comme un autre de se protéger d’une réalité trop difficile à vivre.

Un des intérêts principal du livre est par contre cette ode permanente à la science-fiction au travers des lectures de Mori. Les références littéraires sont nombreuses et l’on découvre si on ne connaissait pas encore une multitude d’auteurs tels que Samuel Delany, Roger Zelazny, James Tiptree Jr, Ursula K. Le Guin et Robert Silverberg, ou Tolkien…

L’accumulation de références pourrait faire peur. Il n’en a pas été le cas pour moi… Car elles sont accompagnées et enrichies de réflexions sur les thématiques abordées dans leurs œuvres et nourrissent la profondeur d’esprit dont fait preuve Mori… car elles ne sont jamais décrochées du récit.

Alors certes, ce livre à la lecture n’est pas ce à quoi on pouvait s’attendre au départ, mais renferme cette magie qu’ont les livres lorsqu’on les ouvre : la découverte de l’univers d’une adolescente pas comme les autres, à la fois naïve et mature qui distille ses réflexions sur sa vie et ses lectures.

Une ode à la différence, à la manière aussi dont on peut vivre avec son handicap et un hommage certain à la littérature des imaginaires.

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