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Les chroniques de la Rue des livres

Les présentations de romans, albums pour petits et grands, diffusées sur Radio d'Oc Moissac

Les esprits de l'eau / Christine Watson .- Denoël & D'ailleurs, 2013.

Publié le 24 Novembre 2014 dans Romans, Afrique, Société, Politique

Les esprits de l'eau / Christine Watson .- Denoël & D'ailleurs, 2013.

Un premier roman organisé en deux parties, l’une retrace l’enfance et l’adolescence d’une nigérienne nous faisant ainsi découvrir les rites et le quotidien d’une famille, l’autre nous fait basculer vers la réalité tragique et les combats socio-politiques s’opérant entre la population du delta du Niger et l’administration.

Le roman est écrit à la première personne. Blessing raconte la séparation de ses parents, l’exil vers le village de ses grands-parents dans le delta du Niger. A l’arrivée dans le village c’est le choc des cultures : dialectes et nourriture différents, religion musulmane, conditions d’hygiène déplorables, et aussi la crainte de la pollution, des maladies, des combats dont elle a entendu parler au sujet de l’exploitation du pétrole par les blancs.

La première partie, très détaillée, est une chronique du quotidien dans lequel tentent de s’adapter Blessing, Ezikiel son frère et sa mère. Faire sa toilette dans le fleuve, cohabiter avec l’Islam, parler les langues de la tribu, éviter de croiser les gangs de jeunes armés qui terrorisent la population…

Pendant que sa mère travaille comme serveuse dans un hôtel, Blessing et son frère vont à l’école qui devient trop chère et qu’ils abandonnent pour des raisons différentes.

Blessing va peu à peu être formée par sa grand-mère au métier de sage-femme, les scènes d’accouchement sont détaillées avec force et un peu trop nombreuses d’ailleurs.

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Le coeur régulier / Olivier Adam .- Points, 2011

Publié le 24 Novembre 2014 dans Romans, Sentiments

Le coeur régulier / Olivier Adam .- Points, 2011

Suite au décès de son frère Nathan, Sarah part sur les traces de son jumeau de cœur au Japon là où il a vécu ses derniers jours. Quittant sa vie rangée et insipide de mère, épouse, professionnelle ayant prouvé à sa famille qu’elle avait réussi, elle part aussi dans la quête d’elle-même au travers d’une meilleure connaissance de son frère. Cet homme si proche et si différent qu’elle n’a pas su comprendre, qui rejetait les conventions, un écorché vif qui menait une vie hors norme fragile sans autonomie, et qui développait au fond de lui la passion de l’écriture frustrée, jamais reconnue.

Elle était sa bouée, sa sœur jumelle, qui le protégeait et le récupérait au bord du gouffre même financier, au grand dam de son mari.

Tout au long du roman, la culpabilité de Sarah s’exprime tout comme son amour passionnel pour son frère, le choix de vie qu’elle a fait et qu’elle regrette. Il y a une partie sur la déconstruction et une seconde sur la découverte de soi, la libération du poids de la responsabilité.

Lors de son séjour au Japon dans ce village de bord de mer, Sarah va côtoyer des personnages lumineusement étranges dont Natsume Dombori, un vieillard discret et humble qui empêche les gens de se jeter du haut des falaises dans la mer et auprès duquel Nathan se serait ressourcé. Il pose sa main sur leur épaule et les invite à passer quelques jours chez lui, et cela semble fonctionner dans cette société japonaise où les suicides sont fréquents.

C’est un récit triste, l’histoire n’est pas originale certes, les clichés sont nombreux (la femme qui a réussi, qui s’ennuie avec son mari, la sœur petite dernière qui est la préférée et ne comprend rien au drame, les séminaires d’entreprise…). C’est l’écriture d’Olivier Adam dans sa fluidité et sa simplicité qui nous emmène, et surtout son impressionnante capacité à se fondre dans un personnage féminin qui nous touche.

"J'aime ici que l'on chérisse ses morts en plein cœur de la vie, qu'à tout instant l'on interrompe le cours des choses pour se recentrer sur l'essentiel, ses souhaits les plus profonds, le sens de ses actes, l'amour qu'on porte à ses proches, sa famille, ses amis. J'aime sentir Nathan flotter autour de moi, emplir l'air, sentir son haleine, ses temps toujours moites, la chaleur de ses mains, j'ai la sensation brûlante qu'il est là, tout proche."

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N'aie pas peur si je t'enlace / Fulvio Ervas .- Editions Liana Levi, 2013

Publié le 24 Novembre 2014 dans Romans, Famille, Sentiments

N'aie pas peur si je t'enlace / Fulvio Ervas .- Editions Liana Levi, 2013

Cette histoire vraie est une épopée, un road movie à travers l'Amérique du Nord.

Formidable voyage initiatique d’un père, Franco Antonello, avec son fils, Andrea, 18 ans, autiste, qui entreprennent un voyage à moto aux Etats-Unis et en Amérique latine.

Pendant les vacances d’été, le père décide de faire un voyage, comme un défi qu'il se lance pour mieux comprendre et surtout vivre quelque chose de libre, de fou avec son fils.

Le voyage se passe toujours bien, Andrea est bien accepté, voire admiré chez certains peuples.

Andrea ne parle pas, il écrit des bouts de phrases avec l’ordinateur « Amérique belle », « femme belle », des mots morcelés, des mots brusques, des mots purs qui résonnent, un concentré d’émotions brutes.

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L'étourdissement / Joël Egloff .- Gallimard, 2006 . (Folio)

Publié le 17 Novembre 2014 dans Romans, Société

L'étourdissement / Joël Egloff .- Gallimard, 2006 . (Folio)

Le récit d’une vie ordinaire d’un gars (c’est le ton du livre !) ou plutôt d’un type qui travaille dans un univers glauque, celui d’un abattoir. C’est la vie d’un homme qui vit seul avec sa grand-mère acariâtre, qui rêve de travailler ailleurs et de vivre une autre vie et pourtant le temps passe vite « J’ai rien vu passer du tout finalement à part les bêtes que l’on saigne ». Le rêve est pour lui une échappatoire au quotidien.

Dans ce court roman de 140 pages, qui ressemble plutôt à un conte, on dévore les mots de ce personnage central sans prénom, c’est écrit sans négations, en langage oral comme si une voix intérieure nous parlait.

*****

On pourrait trouver cette histoire glauque, d’ailleurs elle l’est réellement tant le tableau est triste, grisâtre, pollué. Mais l’humanité est partout dans chaque molécule de pollution ou de lassitude quotidienne.

L’environnement tout d’abord, l’histoire se situe en périphérie de ville, un paysage sans soleil ni éclaircie où le brouillard s’installe du matin jusqu’au soir, et quand il pleut « ça fait du bien, ça lave le ciel, il en a bien besoin », on voit les traînées noires laissées par la pluie sur les visages. On ne distingue qu’à peine la route, et vieux et enfants ont les mêmes visages gris et fatigués. Le décor c’est un paysage de cheminées, d’enfilades de pylônes, de postes de transformation, de lignes EDF qui font dresser les cheveux et font crépiter des étincelles bleues vous donnant mal au crane.

Il y a des bois, sorte de cavernes d’Ali Baba, où les trouvailles les plus insolites servent à meubler confortablement la maison : bidet, canapé, et même une boîte noire d’avion transformée en meuble-lampe abat-jour.

Près de là, la casse et les épaves de voiture, refuge des accidentés de la vie comme le vieux Coppi qui s’est fait fendre une partie du cerveau à l’abattoir et migre d’épave en épave en choisissant le confort suprême des berlines.

Et puis le lieu le plus apprécié, c’est la décharge, parc de jeux des enfants et station balnéaire l’été, c’est quand même mieux que Pétaouchnock même si l’eau est sale comme de l’eau de vidange et la rivière mousse. Les poissons préfèrent sortir de l’eau car ils ont des démangeaisons, des pustules et les yeux rouges, d’ailleurs ils veulent tous s’échapper pour se réfugier dans votre poêle (« Ca mord pas trop ?! »).

Au dessus dans le ciel, les avions nous rasent la tête et il faut les aider à décoller en faisant de grands gestes pour que ça passe.

Le travail routinier à l’abattoir : on en apprend les gestes, les risques et même mortels. Mais on y connaît l’amitié, la générosité et le partage (avec le copain Bortch), on y rencontre l’amour (avec un maîtresse qui amène ses maternelles visiter l’abattoir).

Cela aide à surmonter la honte, le regard culpabilisant des autres, les moqueries des enfants.

L’humanité habite ce roman, chaque détail le plus glauque renferme sa dose d’humour, on visualise avec empathie ces personnages, on s’y attache, on a envie de les aider. Ils ne sont pas malheureux, juste un peu résignés mais ils ont assez de détachement pour voir la vie autrement et c’est sans doute une leçon d’espoir que Joël Egloff nous donne face aux grisailles de la vie.

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La liste de mes envies / Grégoire Delacourt .- JC Lattès, 2013

Publié le 17 Novembre 2014 dans Romans, Sentiments

La liste de mes envies / Grégoire Delacourt .- JC Lattès, 2013

Jo et Jocelyn vivent à Arras. Elle a 47 ans, ils mènent une vie de couple banale.

Ses rêves se sont enfuis.

Des collègues la font jouer au loto, ça bouleverse sa vie, enfin « Jo va faire de beaux rêves cette nuit ».

Ambivalence, on pressent que l’histoire ne va pas se dérouler comme prévu. Ambiguïté de ces mots, qui peuvent être interprétés de deux façons.

Jo travaille dans une mercerie, tient un blog avec des milliers d’admiratrices.

Elle gagne au loto. Elle fait un malaise, le cache à son mari. « Je voulais te dire que je t’aime. Et je me jurai qu’aucune somme d’argent jamais, ne vaudrait de perdre tout ça ».

Le jour où elle gagne au loto, elle marque ses envies sur une liste qu’elle garde secrète, fait évoluer au fil du temps, et cache le chèque du loto.

« C’est un psychologue, vous devez le rencontrer. Je ne savais pas qu’avoir 18 millions était une maladie ». En fait c’est la maladie de ceux qui n’ont pas gagné, la jalousie, la trahison, la convoitise brûle tout sur son passage.

L’argent réduit-il les distances, rapproche t-il les gens ? Face à la maladie de la fille d’une cliente, que peuvent 18 millions ?

"Parce que l’amour ne résisterait pas à la vérité, il y avait une chance sur des millions pour que j’épouse un Jocelyn et il a fallu que ça tombe sur moi, Jocelyn et Jocelyne. Une chance sur des millions. Et c’est tombé sur moi. "

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